Il est intéressant et amusant de savoir que, de 1879 à 1934, il y eut deux gares en service à Marlieux :
- L’une pour la Compagnie du Chemin de fer des Dombes dont la ligne allait de Bourg à Lyon,
- L’autre pour la ligne de Marlieux à Châtillon sur Chalaronne . Le train qui l’empruntait portait le nom de Châtillonnaise
ou Galoche.
L'histoire de ces deux lignes est indissociable du nom de l'homme qui consacra sa vie à les promouvoir Alphonse CLEMENT-DESORMES.
Né en 1817 ,ingénieur à la compagnie Saint-Gobain, maire de la Chapelle du Châtelard où il vit dans son château , il fonde en 1846 les Hauts Fourneaux,Forges et Ateliers de la construction d'Oullins d'où sortent des locomotives.
L'histoire commence par la création de la ligne Bourg-Lyon sur laquelle
va se "greffer" en 1879 celle reliant Marlieux à Chatillon sur
Chalaronne.
24 août 1856
Monsieur Goiffon, maire de Marlieux,demande au conseil municipal de se prononcer sur le projet d’un chemin de fer qui traverserait la Dombes et la relierait aux grands centres de population qui l’entourent.
Le conseil tout entier s’associe à toutes les communes concernées en faveur de la création de ce projet et remercie ceux qui en ont eu l’heureuse initiative.
Pour l’obtenir plus facilement, les plus « gros » propriétaires de Marlieux sont décidés à céder gratuitement tous leurs terrains traversés par ce chemin de fer qui sortira la Dombes de l’état malheureux où elle se trouve ….
Le Conseil émet aussi le vœu que la ligne projetée suive à quelque exception près, la route N°83 allant de Bourg à Lyon, devenue pour ainsi dire déserte depuis la création du chemin de fer de Genève, ce qui a replongé la Dombes dans l’état d’oubli et de misère où elle se trouvait quelques années auparavant.
Le 24 août 1862, sa Majesté l’Empereur accorde à la Dombes un chemin de fer allant de Lyon à Bourg par Villars et un dessèchement de 6000 hectares d’étangs au moins.
L’année suivante, monsieur Mangini et ses fils créent la Compagnie du chemin de fer de la Dombes.
18 juin 1865
« Le Conseil municipal expose à l’Administration Supérieure que la gare de Marlieux dont l’emplacement a été primitivement désigné au lieu dit « la Mitaine », ne peut être établie qu’au village , au chevet de l’église parce que placée là, elle se trouve au centre de quatre chemins aboutissant aux communes de Châtillon, le Châtelard,St Georges,St Germain, St Nizier et Châtenay.
- Le développement de la gare établie au village de Marlieux ne gênera en rien les constructions tandis que si l’on établissait la gare à la Mitaine, plus tard peut-être, on y construirait quelques maisons qui formeraient une seconde agglomération loin de toute surveillance et qui finirait par devenir un lieu de désordre pour la commune.
- La gare placée à la Mitaine serait nuisible aux intérêts de toutes les communes voisines pour n’être utile qu’à celle du Plantay et encore seulement pour aller à Bourg car la commune du Plantay ira de préférence à la gare de Villars qui lui supprimera 7 km sur le parcours de Lyon…. »
Le 1er
septembre 1866, la Compagnie du Chemin de fer de la Dombes ouvre la ligne reliant Bourg à
Sathonay puis Lyon Croix Rousse. Après le refus de Chatillon et Chalamont
d’accueillir la ligne , le choix du tracé s’est fait par Villars . A Marlieux ,
le maire monsieur Rémond cède
gratuitement à cette Compagnie l’emplacement de la gare près du village et la commune en prépare l’accès.
Le 7 mai 1872, la Compagnie du Chemin de fer de la Dombes deviendra Compagnie des Dombes et des Chemins de fer du Sud-Est.
A partir du 28 septembre 1874, cette dernière arrêtera son service de voyageurs et de marchandises à Sathonay alors qu’il se faisait jusqu’à Lyon.Cette décision est prise à la suite d’une demande de péage sur le tronçon Sathonay-Lyon , devant des difficultés financières rencontrées par la Compagnie des Chemins de fer de Lyon- Sathonay.
7 novembre 1875 : le conseil municipal considérant :
- Que depuis l’arrêt des trains de la Dombes à Sathonay, le transport des marchandises est devenu impossible entre Marlieux et Lyon.
- Qu’il résulte de cette interruption des inconvénients de toutes sortes pour les voyageurs et une perte de temps considérable…
- Que les habitants de la Dombes ont souscrit de leurs deniers pour l’établissement du chemin de fer, qu’ils ont donné pour la plus grande partie les terrains nécessaires à son établissement, non pas en vue d’une ligne s’arrêtant à Sathonay mais allant directement à Lyon…
- Que le service direct s’est fait pendant de nombreuses années et n’a été interrompu que depuis la vente de la ligne de Sathonay-Lyon.…..
- Que si le ministre se croit sérieusement impuissant pour faire rétablir le service direct, il reste au gouvernement un moyen , c’est le rachat de la ligne de Sathonay-Lyon
En conséquence, le conseil, à l’unanimité, demande à l’administration de mettre fin à la situation actuelle …
En 1883, Monsieur Mangini accepte le rachat de la Compagnie du chemin de fer des Dombes par le PLM (Paris-Lyon-Marseille.) Une deuxième voie est mise en service et un raccordement se fait vers Lyon-Perrache . Pendant la guerre de 1914-1918 une des deux voies est sacrifiée pour récupérer l’acier.
2/ LE PETIT TRAIN MARLIEUX CHATILLON dit "la Galoche"
Une deuxième gare est crée à Marlieux en 1879
Bénie le 9 août 1879 par l’évêque de Belley, la ligne sera mise en service le 14.
Voici un extrait de son INAUGURATION tiré du Courrier de L’Ain du 12 août 1879
« L’inauguration de la voie ferrée de Marlieux à Châtillon a eu lieu hier par un soleil magnifique. A 9 heures et demie, les invités étaient reçus , à la gare de Marlieux sur la ligne des Dombes, par Monsieur Clément Desormes,le concessionnaire et le créateur de la nouvelle ligne….
Sur les rails tout neufs, un bijou de locomotive et 2 wagons aussi confortables qu’élégants attendent les voyageurs. L’avant de la locomotive est ornée de bouquets et de drapeaux ; des oriflammes se balancent aux fenêtres des maisons voisines . Enfin, le signal du départ est donné….
C’est un charme de traverser en 25mn la distance qui sépare Marlieux de Châtillon
La voie est excellente et les roues glissent sur les rails sans imprimer aux wagons ni ballottements ni secousses.
Cette petite ligne de Marlieux à Châtillon est appelée à faire école, croyons nous. tout y est nouveau : l’écartement des rails à 1 m, leur poids de 16kg,la distribution des traverses, les charmantes machines de 9 tonnes en marche, construites par le Creusot sur un type entièrement inédit et indiqué par Monsieur Clément Desormes.
Pour les voitures, elles sont aussi coquettes que douces et confortables et la Compagnie Française Bonnefand, qui les a exécutées sur les données du concessionnaire, en a reçu de nombreux compliments, avant leur expédition de Paris.
Il est généralement admis que notre pays de Dombes est aussi plat que monotone . Pourtant, le chemin de fer de Marlieux à Châtillon a des remblais de 5 et même de 8m75.
Mentionnons un pont de 6 m à Marlieux et un autre sur la Chalaronne de 22 m de longueur et 9 m de hauteur, d’où l’on a une vue charmante.
Disons encore que la plus forte courbe, celle qui part de la gare de Marlieux, a 200m…
Le prix de revient ce cette ligne à voie étroite, longue de 11km environ est à peu de choses près de 52 000 Francs par km. Les subventions qui lui ont été attribuées s’élèvent à 160 000 francs environ. On voit de suite qu’elle est la part des sacrifices qu’a dû s’imposer monsieur Clément Desormes pour doter la Dombes d’un chemin de fer qui était un essai et qui va probablement devenir un bon exemple …….
Le train s’arrête au Châtelard, première station : là, des rafraîchissements attendent les invités qui descendent dans un coquet jardinet ; madame Clément Desormes fait avec beaucoup de bonnes grâces les honneurs de ce premier temps d’arrêt . On stationne quelques minutes aussi au Moulin des Champs, puis le train file à toute vapeur sur Châtillon.
Presque toute la population est accourue pour saluer le premier convoi pénétrant dans la gare où il est accueilli par monsieur Robelin maire ,à la tête du conseil municipal , par la Société des Trompes Châtillonnaises qui sonne des fanfares et par la Société Philharmonique qui fait entendre ses meilleurs morceaux.
Pendant que la locomotive donne dans la gare une répétition de toutes les manœuvres usitées, nous remarquons que monsieur Clément Desormes est très entouré et très fêté ; les habitants de Châtillon font éclater tout haut leur sympathie et leur reconnaissance pour le créateur de cette ligne qui va les mettre en relation directe soit avec Bourg soit avec Lyon…….
Il est 2 heures, le train qui nous a amenés nous remporte à Marlieux .Là, chacun se sépare en se donnant rendez-vous à Châtillon dimanche prochain 17 août pour des courses et en faisant des vœux pour que ce jour là, un aussi brillant soleil prête ses rayons à une fête aussi bien réussie que celle à laquelle on venait d’assister. »
Le 17 eurent lieu à Châtillon les courses hippiques et l’inauguration du chemin de fer avec feu d’artifice et bal public.
Ce petit train : la Châtillonnaise , plus communément appelé la Galoche roulait à 20 km/h sur une voie à écartement étroit (1m). Il pouvait transporter 40 tonnes de marchandises et 36 voyageurs.
Les travaux d’infrastructure , menés très rapidement à la pelle, à la pioche, à la brouette, employèrent une importante main d’œuvre locale.
A Marlieux, la gare était à côté de celle de la ligne Lyon Bourg d’où l’intitulé Marlieux et ses deux gares.
A 500 mètres de celle-ci, la ligne traversait la route de Marlieux à Chatillon par un passage à niveau gardé, muni de barrières métalliques roulantes.
La maison de la garde- barrière comportait outre le logement, une pompe pour aspirer l’eau du Renom et la déverser dans un réservoir situé à l’étage , où les locomotives venaient pour faire le plein.
A la Chapelle du Châtelard, une ancienne ferme qui deviendra l’actuel restaurant« les Platanes »,servait de gare avec salle d’attente, magasin , buffet et logement.
Une halte avait lieu à Moulin des Champs encore baptisée arrêt des pêcheurs puis on arrivait à Châtillon sur Chalaronne où se trouvaient le dépôt et l’atelier d’entretien des machines.
Un projet initial prévoyait un souterrain de 125 m qui devait passer sous le vieux château à Châtillon mais. Il sera abandonné.
Trois allers et retours assuraient les correspondances PLM à Marlieux.
Des trains supplémentaires circulaient les jours de foires et marchés,pour les pèlerinage à Beaumont ou les courses hippiques à Châtillon.
En 1880, la compagnie employait 17 personnes.
L’exploitation de la ligne se déroule sans problèmes jusqu’à l’année 1917, pendant laquelle un grave accident conduit la société exploitante au bord de la faillite : 2 trains se télescopent aux Vannières. (manque de personnel à cause de la guerre, pas de ligne télégraphique ni téléphonique. )
Il y eut un blessé léger mais toute la nuit, il fallut rechercher les vaches échappées du train.
La Châtillonnaise est alors rachetée par le département puis la régie départementale des Tramways de l’Ain l’exploite à partir du 1er Juillet 1919. Elle diminue les effectifs et en 1922 et décide de ne plus maintenir de garde barrière pour surveiller le passage à niveau qui fonctionne depuis la création de la ligne Marlieux Châtillon.(Il faudrait que la commune verse à la Régie 60 francs par mois ce qui lui est impossible.)
Les propriétaires intéressés sont mis en demeure de couper leurs haies à la hauteur réglementaire pour permettre aux mécaniciens d’apercevoir les voitures et à celles-ci de voir le train.
Les barrières sont enlevées de façon à indiquer au public que le passages à niveau n’est plus gardé, et des poteaux indicateurs sont placés pour indiquer la dangerosité du lieu .
Toutes ces mesures d’économie sont insuffisantes et le 1er mars 1934, le petit train devenu non rentable, s’arrête de rouler. Les cars qui conduisaient directement les voyageurs à Lyon avaient sonné le glas de la Galoche.
Au dire des anciens, son dernier voyage s’est terminé dans un sifflement incessant qui s’est perdu peu à peu dans le lointain.
Le père de Charlot Thévenet avait eu le plaisir de conduire cette machine de 1918 à 1920. On peut d’ailleurs voir son portrait sur le mur du Musée du Train miniature à Châtillon.
2 mars 1936
Le tronçon de la ligne Marlieux Châtillon allant de la gare au pont du Renom et formant un talus, est acheté par la commune. Il servira de chemin reliant le quartier de la gare et de la gendarmerie au lavoir et au quartier du pont.
13 juin 1949
La ligne de tramway de Marlieux à Châtillon est déclassée.
La commune fait l’acquisition de l’ancien dépôt de Marlieux et de l’ancienne plate forme en remblai de la voie ferrée.
Cet ancien dépôt sera plus tard transformé en salle des fêtes.
SOURCES
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